Gérald Darmanin perturbe le message sur la transformation de l’action publique.

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© Capture twitter de @GDarmanin
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Le second comité interministériel de la transformation publique s’est tenu le 29 octobre, en présence de la quasi-totalité des membres du gouvernement. Le Premier ministre Edouard Philippe a détaillé sa stratégie pour la modernisation de l’Etat, déclinée en une feuille de route pour chaque ministère, et une série de mesures transversales. Alors que juste la veille, certains propos sur la fonction publique de Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des comptes publics, ont suscité, à nouveau, inquiétudes et incompréhension des organisations syndicales.

Le premier comité interministériel de la transformation publique (CITP), le 1er février dernier, avait  initié le lancement du chantier de la modernisation de l’État, avec de nombreuses annonces sur la fonction publique, la modernisation des services publics, la qualité du service…., qui ne demandaient qu’à être concrétisées.

Huit mois plus tard, le second comité interministériel est l’occasion de redonner un second souffle à ce dossier qui manque de visibilité. Mais il s’agit aussi de détailler les feuilles de route ministérielles, et de fixer un cadre à cette transformation publique, largement inspirée des propositions du rapport du comité des experts Action publique 2022 – Édouard Philippe a estimé que 60 à 75 % de ses propositions avaient été reprises.

Une légère impression de déjà vu se dégage des mesures annoncées : un certain nombre figuraient déjà dans le premier CITP. Et comme en février, ce sont les annonces sur la fonction publique qui font le plus parler.

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Le contrat : simple extension ou nouvelle règle ?

«Généralisation » ou « recours accru » aux contrats : à la veille du CITP, le ministre de l’Action publique, Gérald Darmanin, a semé le trouble sur les réelles intentions du gouvernement dans le cadre du programme Action publique 2022 (AP22). Au micro d’ Europe 1, dimanche 28 octobre, il a évoqué la «  généralisation du contrat  » : « Il y aura la possibilité de passer par le statut et la possibilité de passer par le contrat ». Et d’expliquer que les agents publics pourraient désormais « venir pour 5, 10 ou 15 ans dans la fonction publique ».

Un terme (« généralisation ») et des éléments que les syndicats semblent avoir découvert hier, alors que la concertation se poursuit sur ce sujet. La dernière réunion sur la rémunération des agents, la transition professionnelle et la mobilité doit d’ailleurs se tenir ce mardi 30 octobre.
Aussi, par ses propos, Gérald Darmanin donne le sentiment aux syndicats de remettre en cause six mois de concertations. «  Substituer le contrat au statut, ce serait la source d’un conflit potentiel», a rappelé Mylène Jacquot (CFDT) au micro de France Inter. Est-ce « une nouvelle provocation de Gérald Darmanin, ou un propos maladroit ? », s’est interrogé l’Unsa. Le terme « généralisation » a en tout cas été réitéré via un tweet :

«  À aucun moment, on ne nous a présenté ce scénario », déplore le syndicat. Jusqu’à présent, le gouvernement avait soumis aux syndicats un « contrat de mission », de six ans maximum, qui prendrait fin une fois conclu le projet justifiant le recrutement.
De même, Gérald Darmanin avance que la mise en place de « plans de départ volontaires » permettra aux fonctionnaires de « rester » ou de « partir » avec « 24 mois de salaire » et « la possibilité de toucher le chômage, ce qui n’était pas le cas jusqu’ici ».
« Que [Gérald Darmanin] laisse Olivier Dussopt faire les choses  ! », a rétorqué FO.

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Au lendemain de cet emballement médiatique, et juste avant ce deuxième CITP, Olivier Dussopt était donc en opération déminage sur la Matinale de LCI : « Il n’y a pas de surprise […] on voit comment on peut assouplir les conditions de recours aux contractuels. »

A noter par ailleurs, un autre axe de réforme présenté ce jour (qui devrait être débattu mardi) pour donner plus d’autonomie et de responsabilité aux managers et aux agents : « la part de rémunération variable des gestionnaires et cadres dirigeants sera augmentée ; elle sera calculée notamment en fonction de critères de bonne gestion financière et l’atteinte de cibles de performance précises et quantifiables ; sur le plan managérial, la reconduction, ou non, dans les fonctions se fera selon les résultats obtenus ».

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Un service public « proche et simplifié »

Pour ce qui est des mesures transversales, quatre principes les structurent, pour mémoire :

  • le renforcement de la proximité avec les usagers, pour des citoyens qui sont en attente ;
  • la simplicité d’accès aux services publics, fondée notamment sur le déploiement des services numériques, avec l’objectif de 100% de services dématérialisés en 2022 ;
  • une clarification et une simplification des missions de l’Etat, avec une réforme des administrations centrales, la suppression des doublons avec les collectivités territoriales ;
  • et enfin une transformation en interne de l’Etat, dans son management, fondée sur l’idée de contrat.

La notion d’économies n’est cette fois pas mise en avant, mais elle reste bien présente. L’objectif de 50 000 suppressions d’emplois est réaffirmé, et une agence d’accompagnement à la reconversion des agents va être créée.

Concrètement, pour se rapprocher des usagers, le Gouvernement annonce le lancement en 2019 du site « Vox usagers », qui leur permettra de s’exprimer et de faire part des difficultés rencontrées. Par ailleurs, le gouvernement s’engage à proposer de nouveaux services sur le territoires, via des accueils communs et mutualisés, l’enrichissement de l’offre dans les maisons de services au public, des agents plus polyvalents, comme pour l’expérimentation « Carte blanche » menée à Cahors…

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Le développement de services numériques va se poursuivre, avec l’inscription en ligne sur les listes électorales généralisée en 2019, le lancement du Pass culture, application mobile géolocalisée permettant d’accéder aux offres culturelles disponibles, avec un subventionnement pour les jeunes majeurs…

S’agissant du fonctionnement même de l’État, les préfets ont remis leurs propositions sur la réorganisation de l’administration territoriale ces dernières semaines, et Édouard Philippe promet des annonces sur le sujet avant la fin de l’année.
Le ministère de l’Economie et des finances, s’inspirant des propositions du rapport des experts AP 2022, a déjà entamé le recentrage de son action d’accompagnement des entreprises, prenant acte de la montée en compétence des régions.

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Quant aux managers publics de l’Etat, on leur annonce une plus grande liberté de gestion, avec des possibilités élargies de recours aux contractuels, la possibilité de rémunération au mérite des personnels, une projection pluri-annuelle des moyens, un exercice de leurs missions reposant sur une contractualisation des objectifs, et un contrôle annuel de leur respect.

Enfin, chaque ministère s’est vu assigner une feuille de route de modernisation, avec une série d’objectifs fixés, qui sont en fait ses grands dossiers déjà en cours. L’un des leitmotivs du CITP étant la nécessité de l’évaluation – des services publics, des agents-, rendez-vous dans quelques mois pour vérifier si le Gouvernement a rempli ses objectifs.

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