La colère des élus après les annonces d’Emmanuel Macron

                                                                                                       Publié le 18/07/2017 • Par Marie-Pierre Bourgeois • dans : A la une, France

 

 

Caresser puis cogner. Les associations d’élus ont beau avoir unanimement salué la « méthode » de la Conférence nationale des territoires, permettant d’ouvrir les discussions entre l’Etat et les collectivités, elles sont toutes vent debout contre la baisse des dépenses de fonctionnement à hauteur de 13 milliards et l’exonération de la taxe d’habitation.

Emmanuel Macron n’ignorait pas qu’il marchait sur des œufs devant les élus locaux réunis au Sénat pour la première Conférence des territoires le 17 juillet. Si la journée a bien commencé, plusieurs annonces ont fortement crispé le débat.

Une méthode appréciée mais…

En préambule de ce grand rendez-vous entre Emmanuel Macron et les collectivités, les associations d’élus ont toutes salué la méthode retenue par l’exécutif.

A commencer par Régions de France qui a apprécié que « le Gouvernement ait manifesté sa volonté de mettre fin à la baisse unilatérale de la dotation au bénéfice d’un processus contractualisé. »

Même son de cloche pour François Baroin (LR) au nom de l’Association des maires de France (AMF). « Nous sommes satisfaits de l’organisation de cette conférence, satisfaits du calendrier rapide pour mettre au point un pacte girondin, et satisfaits de la vision partagée de ce qu’est un pacte, c’est-à-dire des négociations qui permettent d’associer les points de vue de deux partenaires » a ainsi déclaré le maire de Troyes.

L’avis est partagé par Olivier Dussopt (PS), le président de l’Association des petites villes de France (APVF) : « nous avions crainte que cette conférence soit une instance d’information, mais nous allons vers une instance de discussion ».

La baisse de 13 milliards de dépenses de fonctionnement passe très mal

Mais le ciel bleu n’a pas duré longtemps entre l’Etat et les territoires. Annonce-surprise d’Emmanuel Macron : la nouvelle de la baisse de 13 milliards des dépenses de fonctionnement, et non 10 milliards comme annoncé pendant la campagne, a été accueillie très froidement par les élus locaux.

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Philippe Richert (LR), le président de Régions de France, a ainsi rappelé que « dans le cadre du plan précédent d’économies, les collectivités locales ont réalisé près de 90% de leur engagement, soit 9,5 milliards d’euros, alors que l’Etat uniquement 25% ». Autrement dit, « c’est à l’Etat d’assurer l’essentiel des efforts ».

Capitale Grande couronne qui réunit les présidents des départements de l’Essonne, des Yvelines, de Seine-et-Marne et Val-d’Oise a attaqué plus directement le président de la République : « quels sont les efforts que nous devons encore faire ? Nous attendons maintenant que l’Etat nous indique les services à la population que nous devons supprimer. S’agit-il de la restauration scolaire, des transports scolaires, du RSA ? »

Une angoisse partagée par Olivier Dussopt qui se demande « quelles dépenses seront visées » et reconnaît ne pas croire à un dispositif de suivi des dépenses « pour 36 000 communes » comme l’a laissé entendre Emmanuel Macron.

François Baroin partage ce scepticisme et estime que « l’Etat va avoir du mal à distinguer dépenses de fonctionnement ou dépenses vertueuses. Pour nous, il s’agit toujours d’investissement local ». Quant à Jean-Luc Moudenc, président de France urbaine, lui aussi se demande « si les élèves qui ne sont pas bons la première année risquent le coup de règle l’année suivante. »

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L’exonération de la taxe d’habitation tout aussi difficile à avaler

Les élus communaux n’ont pas non plus caché leur colère face à la fin de la taxe d’habitation pour 80% des ménages. « Je ne suis pas sûr de bien comprendre. La taxe d’habitation serait injuste pour 80% des foyers et non pour les 20% restants », a ainsi raillé le maire de Troyes. « Si nous devons faire la liste des impôts injustes, attaquons-nous à la TVA, qui ne dépend pas du revenu, et qui est la même pour tous », a-t-il avancé.

Philippe Laurent, numéro 3 de l’AMF a estimé que « Macron fait des cadeaux aux Français sur nos dos. Il ferait mieux de ne pas vouloir augmenter la CSG. »

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Ville et Banlieue s’inquiète, elle, du sort qui est fait aux quartiers populaires par le biais de cette réforme : « il ne peut pas être demandé de façon identique [les mêmes efforts] aux territoires pauvres accueillant des pauvres et aux sites plus aisés ». L’association juge d’ailleurs que « réduire l’offre de services ou d’équipements publics des quartiers populaires, c’est rendre impossible l’effort républicain de réduction des inégalités entre citoyens. »

« Cette annonce se contredit avec toutes les autres du Président qui parle de confiance entre l’Etat et les collectivités », a jugé Olivier Dussopt, tandis que le président de l’Association des maires ruraux, Vanik Berberian parle « d’enfumage ».
Quant à Jean-Luc Moudenc (LR), le président de France urbaine, il remarque que le terme « dégrèvement » n’a pas été prononcé. « Cela serait pourtant un moindre mal », remarque François Baroin « même si c’est la méthode qui coûte le plus cher à Bercy, et je parle d’expérience », a souligné l’ancien Ministre de l’Economie.

Emmanuel Macron donne désormais rendez-vous aux élus locaux le 2 décembre prochain pour la prochaine Conférence des territoires. Il sera attendu de pied ferme par les territoires qui auront observé avec attention le projet de loi de finances qui devrait décider des modalités précises de l’exonération de la taxe d’habitation.

Ce que Dominique Bussereau (LR), le président de l’Association des départements de France, résume en une formule : « il est évident qu’un simple échange d’un peu plus de liberté contre beaucoup plus de sacrifices financiers ne serait pas acceptable dans les mois à venir. »

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